La gazette du 28 octobre au 31 octobre 2013

Chaque jour, la terre se vide un peu plus de ses entrailles. Sans pitié, nous l’éventrons pour en tirer ses fruits : carottes, betteraves, endives. Nos journées suivent le soleil. Sa lueur nous trouve dans le champ. Quand l’obscurité lui succède, nous rentrons près de nos poireaux. On ferme la porte pour empêcher notre chaleur de partir (bien que le temps nous soit clément). Nos yeux piquent sous les effluves du poireau. Cela rappelle l’enfance. Ces soirées où plus rien ne bougent. Mes grands-parents face à mes parents dans la salle d’épluchage, les mains sales, le tablier où tombent les feuilles abîmées, les conversations sourdes, l’odeur de la terre mélangées à celle des poireaux, notre impatience de rentrer à la maison, à mon frère et moi, la porte battante qui s’ouvrent et se ferment au rythme de nos allées et venues.

Maintenant, on pleure moins sur les poireaux. Le lavage à grand renfort d’eau atténue leur piquant. C’est plus bruyant aussi. La lumière a toujours cet aspect brumeux. L’image parait plus jeune, même si l’on se rend compte que nos âges se rapprochent des parents de nos souvenirs. Doucement, on glisse avec le temps. Nos journées d’enfance deviennent nos semaines d’adulte.

Bonne semaine.

 

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