Un petit peu au pays d’Oz depuis le souffle du vent, nous regardons avec méfiance la méduse aux longs filaments de plastique qui claquent sous l’haleine d’Éole. Le sol emprisonne nos membres inférieurs quand le champ de carottes nous appelle. Les voix des gouttes d’eau deviennent assourdissantes quand nous ramassons nos feuilles à quatre pattes. Les bouches des serres claquent mille mots quand nous leur volons leurs Précieuses rouges pour en faire des tomates. Cette semaine, l’Univers avait basculé, donnant une saveur inédite à notre travail. Peut-être le changement d’heure avec, à la clé, une nouvelle perception du Monde … ?
Une micro goutte de soleil avec les tomates, de la feuille et de l’hiver pour le panier. Ce qui va plutôt bien avec le ciel qui semble ne pas vouloir se départir de sa grimace …
Sous un ciel gris, l’hiver remplit petit à petit nos serres. Le champ se vide de ses fruits. Nos frigos grossissent de nos récoltes. Le moment de passer beaucoup de temps accroupis est venu. Nous arrachons de la terre nos carottes. Nous cueillons nos précieuses feuilles vertes où, parfois, différentes espèces ont été mélangées par un lutin malicieux (ou un homme inattentif). Le jour oublie de se lever le matin. Le rouge-gorge tente de s’installer chez nous et chante son courroux quand nous le délogeons. Le temps se suspend parfois, alors nous reprenons nos binettes pour les derniers désherbages …
La patate douce sera bien présente ces prochaines semaines … parce qu’elle a plutôt bien réussi (contrairement aux fenouils cet automne) et qu’en en plantant la quantité minimum, cela fait beaucoup cette année et que nous ne savons pas vraiment jusqu’à quelle date elle sera bien puisqu’elle ne se conserve pas au frigo … Bref, en frites, en purée ou au four (j’adore quand ma fille les prépare en cubes avec un filet d’huile, des pois chiches et un peu de brocoli à 180°C pendant 30 min au four), il y aura une note sucrée à bien des plats …
La pluie s’invitant un peu tous les jours, nos activités évoluent au gré des nuages. Entre deux gouttes, nous courons activement récolter le plein champ pour finir dans le refuge de nos serres. Les plaisirs d’automne de retrouver la saveur de la douce chaleur des abris. Donc, au final, nous avons repoussé le projet carotte pour nous attaquer aux patates douces, ne serait-ce que pour les sauver des voraces quenottes de nos rongeurs des champs …
Il y a l’idée que le repos du guerrier n’est plus très loin. Moment béni où nous pouvons apprécier hier sans penser encore à demain. Ramasser les feuilles de nos légumes. Border ceux qui en ont besoin. Attendre que les tomates ne rougissent plus. Suivre le battement du cœur du soleil et s’endormir avec lui …
Pommes de terre : ramassées. Courges : au chaud. Betteraves : en hivernage. Prochaine mission : les carottes. Et aussi ranger les serres pour y mettre nos petites feuilles tendres hivernales. Carlos et les mecs jouent de la binette et du tracteur pour nettoyer les cultures restantes (et le petit coup de froid de cette nuit précipitera certainement la fin de quelques résistants estivaux). La saison des épinards est aussi ouverte. Une semaine à se vautrer parmi leurs feuilles et pouvoir ainsi enlever les vilaines herbes qui nous faisaient « coucou ! ». En tous cas, plus de haricots à écosser, nous tournons la page pour cette année. Et nous commençons déjà à penser où nous planterons les pommes de terre l’année prochaine. Et à rentrer le compost. Et il y a aussi les commandes de graines pour novembre. Donc nous allons nous calmer, respirer un bon coup, profiter des derniers rayons d’automne avant de plonger dans la suite. Suspendre notre course le temps de nous retourner, d’apprécier ce qui a été réussi avant de réfléchir à nous améliorer … et, surtout, penser à notre commande pour le Père Noël (parce que j’ai bien vu que la télé commençait à s’ambiancer sur le sujet…).
Les patates sont déjà une histoire ancienne. La nouvelle marotte est : rentrer les betteraves. Qui sont grosses (ben ouais … parce qu’elles ont mal levé …). Carlos pensait commencer vendredi mais … l’urgence d’autres tâches s’est intercalée et les minutes ont filé.
Petite surprise du samedi : nos beaux semis de mâche ont trouvé un prédateur. Toutes les petites graines bien enfouies étaient sur le flanc, vidées de leur substance. Oiseau ou souris ? N’empêche, la moitié est dans l’estomac d’un gourmand …
Notre deuxième marotte est l’herbe. Combat des ¾ de l’année. Et bien futile parce qu’elle est beaucoup plus forte que nous. Mais nous la surveillons du coin de l’œil (ou plongeons en son sein dans le cas de la mâche). Elle mène une tentative perfide dans les épinards et reste anecdotique parmi les poireaux. Mais saura-t-elle garder sa place ?